Art du commun

20 mai, 2005

entre 3 autoroutes

Ce midi je suis sortie pour manger dehors. C'était tellement triste mais tellement joli en même temps. Près de la grande tour à bureaux où je travaille, sur le côté, bien camouflées, se trouvent trois tables à pique-nique. Elles sont placées à l'ombre de trois pommiers, qui sont en fleurs à cette saison de l,années. Je me suis assise à l'une des tables, puis, après mon repas, je me suis étendue sur la banquette. Le soleil tapait sur mon visage, et le vent qui soufflait doucement dans les branches faisait tomber des confettis de pétales parfumés. C'était idyllique… mais dès que je me mettais à penser à l'endroit où j'étais, j'entendais les camions et les voitures sur les autoroutes, la rumeur incessante d'une ville qui refuse de s'immobiliser.
Depuis mon déménagement à Toronto je vis beaucoup de transformations. C'est comme si soudainement tout était devenu émotion, je vis chaque nouvel événement en sentiments plus que par la tête. Et c'est difficile. Je pense que lorsque nous devenons adultes, sans trop nous en rendre compte, nous tentons de vivre selon un certain équilibre émotif, et nous inventons les sentiments que nous devrions ressentir dans tel ou tel moment. Comme si on les amplifiait pour qu'ils soient plus réels. Enfin, avec ce que je vis en ce moment,j'ai l'impression que c'est ce qui est arrivé depuis quelques années. Et puis soudainement je me retrouve comme une enfant, quand chaque petite chose était réellement terrible, chaque drame se transformait en tragédie. L'amour que je ressens, l'amitié, le désir de vivre en harmonie avec les choses qui m'entourent, tout est tellement fort. L'amour me fait mal.

Quand je suis rentrée à la maison ce soir, Mohanad et Tyler avaient aménagé la terrasse, avec un barbecue, un divan, la télé. On arrive toujours à se trouver une zone de confort. On a fumé des joints, mangé des aubergines grillées, puis les gars ont voulu à tout prix regarder le fil Jerry Maguire, qui, comme je m'y attendais, était d'une qualité plutôt minable. Mais j'aime passer mes soirées avec eux. Ils me rassurent, et je pense qu'ils aiment aussi ma présence. Je trouve que c'est plus facile de vivre avec des gars.